Par Sophie Chapelle

Le programme du Rassemblement national est parsemé de contradictions, évoluant au fil des mobilisations agricoles et des sondages. Les revirements s’opèrent parfois du jour au lendemain, notamment sur les thématiques environnementales.

Des pesticides qui « empoisonnent » puis sont indispensables

« Je considère que Monsanto est une entreprise criminelle. Ces entreprises qui, en toute connaissance de cause, empoisonnent notre santé et celle de nos enfants. » Le 28 novembre 2017, Marine Le Pen dénonce sur le plateau de RMC le renouvellement de l’autorisation du glyphosate par la Commission européenne. « Voyez les pesticides, herbicides et autres phytosanitaires, dont le résultat économique est sans aucun doute négatif, une fois pris en compte tous les effets secondaires », ajoute t-elle. Celle qui est alors présidente du Front national se livre à un plaidoyer en faveur des normes et des contrôles. Les parts de marché de l’agriculture française dans le monde viennent de « l’excellence sanitaire agricole et environnementale de nos produits », affirme t-elle encore.

 

Or, ces derniers mois, le Rassemblement national (RN, ex Front national) fait la guerre à ces mêmes normes environnementales et sanitaires. Ce parti considère désormais que la baisse de l’usage des produits phytosanitaires nuirait aux capacités de production des filières, et ne mentionne plus leurs effets délétères à long terme.

En février 2023, des députées RN ont même déposé une proposition de loi en faveur d’une réautorisation des pesticides néonicotinoïdes pour le traitement des betteraves à sucre. Le 22 novembre 2023, le groupe RN – comme l’ensemble de son groupe d’extrême droite au Parlement européen – s’est prononcé contre un projet de règlement visant à réduire de moitié l’utilisation des pesticides d’ici à 2030 et de 65 % pour les plus dangereux d’entre eux.

Le livret thématique du RN sur l’agriculture, affirme aujourd’hui qu’ « il n’y aura désormais plus d’interdiction de substances actives sans solution équivalente et économiquement soutenable ». Le parti reprend là les termes du syndicat agricole majoritaire FNSEA.

L’agriculture bio soutenue dans le programme, pas lors des votes

Lors de la campagne présidentielle de 2022, Marine Le Pen promet dans son programme « un plan de soutien pour l’agriculture biologique ». C’est précisément l’objet du volet agriculture du Pacte vert européen (« Green Deal ») qui prévoit une hausse de 25 % de surface cultivée en bio.

Mais dans l’hémicycle européen, le RN vote systématiquement contre la stratégie dite « de la ferme à la fourchette » - la déclinaison du Pacte vert pour l’agriculture - et s’oppose à tous les textes qui en découlent, notamment sur la montée en puissance de l’agriculture biologique.

Dans le livret thématique agriculture actuellement en ligne sur le site du RN, le parti assure pourtant continuer à défendre un « plan de soutien de cinq ans propre à l’agriculture biologique », tout en votant le contraire au niveau européen. Le RN dit aussi vouloir « contraindre les cantines à utiliser 80% de produits agricoles français », mais n’apporte aucune précision sur la qualité de ces produits ni sur leur mode de production.

Il s’affiche contre la bétonisation mais s’oppose à préserver les terres agricoles

 

Depuis les protestations des agriculteurs et des agricultrices en début d’année, un nouveau visuel du RN réclame de « garantir la préservation des terres agricoles face à l’urbanisation excessive ». Pourtant, quelques mois plus tôt, à l’été 2023, le groupe RN à l’Assemblée nationale a voté à l’unanimité pour l’assouplissement de la loi zéro artificialisation nette (ZAN). Ce texte visait justement à ralentir drastiquement l’artificialisation des sols.

Pour lire la suite de l'article sur Bastamag, cliquez ICI.