Sandra Lucbert [1] : L’automatisation d’un discours qui rend les dépenses publiques responsables du déficit public – discours que j’appelle LaDettePubliqueC’estMal en un seul mot, puisqu’il s’assène d’un bloc – constitue le schème directeur de toutes nos « politiques publiques » depuis trente ans. Des politiques de destruction méthodique de l’État social. LaDettePubliqueC’estMal maquille une stratégie d’appauvrissement délibéré des services publics, qui vise à les délégitimer en organisant leur inefficacité. Une fois celle-ci établie, la place se trouve déblayée pour les services privés : « L’hôpital public ne marche pas ? Regardez les cliniques privées : tout y fonctionne sur du velours. »
L’histoire de Die est un cas d’école. Fin 2017, la maternité – la plus petite de France – est fermée, après trente ans de combat entre l’État et les populations : l’un estimant la fermeture nécessaire, les autres faisant valoir l’exception géographique. Trente ans pendant lesquels la réduction effective de personnel et de moyens matériels transforme peu à peu la maternité, aux dires mêmes des sages-femmes qui y travaillent, en un lieu trop peu sécurisé pour mener les accouchements dans de bonnes conditions. Cette technique que j’évoquais : rendre un établissement public incapable de remplir ses missions par étouffement économique, et en tirer argument pour le fermer. L’étouffement économique, cependant, sera transfiguré dans la langue : « Nous sommes comptables de la dette publique » – et toute discussion s’arrête de par cet énoncé macroéconomique, et ses corrélats moralisateurs.
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