Par Chiara Pignatelli, Martin Drago

Derrière l’adoption mi-avril du projet de loi sur les Jeux olympiques et de son article sur la vidéosurveillance biométrique, il y a la victoire de multinationales de la sécurité et autres start-up de l’intelligence artificielle.

Le Parlement a définitivement adopté le 12 avril le projet de loi « relatif aux Jeux olympiques et paralympiques de 2024 ». Le texte contient un article 7 qui autorise l’expérimentation de la vidéosurveillance automatisée sur le territoire français. Les députés Nupes ont déposé le 17 avril un recours contre ce projet et son article 7 auprès du Conseil constitutionnel.

Comme l’a rappelé La Quadrature du Net, cet article entérine un changement d’échelle sans précédent dans les capacités de surveillance et de répression de l’État et de sa police. La vidéosurveillance automatisée (VSA) est un outil de surveillance biométrique qui, à travers des algorithmes couplés aux caméras de surveillance, détecte, analyse et classe nos corps et comportements dans l’espace public pour alerter les services de police et faciliter le suivi des personnes.

Après le déploiement ininterrompu des caméras de vidéosurveillance (dont le nombre exact n’est toujours pas connu), il s’agit d’une nouvelle étape dans la surveillance du territoire. Alors que la VSA est expérimentée depuis plusieurs années en toute illégalité, ce projet de loi sur les Jeux olympiques vient la légaliser et donner le champ libre aux industriels pour perfectionner et installer dans la durée leurs outils d’algorithmisation de l’espace public.

Un marché à plusieurs milliards d’euros

Comme tout terrain d’influence des lobbies, la vidéosurveillance automatisée est avant tout un marché en pleine expansion. Si l’on en croit la CNIL, qui se base elle-même sur l’étude d’un cabinet américain, le marché représentait en 2020, au niveau mondial, plus de 11 milliards de dollars, avec une croissance de 7 % par an (pour celui de la vidéosurveillance, c’est même 45 milliards en 2020 et 76 milliards estimés en 2025).

L’argent attirant l’argent, les grands groupes et les start-up du secteur enchaînent les levées de fonds, aussi bien auprès d’acteurs publics que privés. Dernier exemple en date, la start-up XXII qui a levé il y a quelques semaines 22 millions d’euros pour sa solution de surveillance automatisée auprès de Bpifrance. En 2018, c’était Thales qui décrochait 18 millions d’euros pour sa solution de « Safe City » à Nice et à La Défense. Notons aussi Sensivic, développement de l’audiosurveillance automatisée, avec sa levée de 1,6 million en juin dernier.

Les financements publics directs affluent dans le secteur de la vidéosurveillance et motivent d’autant plus les entreprises à se positionner sur le marché pour récolter le pactole. En 2022, 80 millions d’euros du fonds de prévention contre la délinquance ont été alloués principalement à la « vidéoprotection » (une augmentation de 10 millions par rapport à l’année précédente).

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