Communiqué LDH

Compte tenu de la situation française relative à sa gestion du handicap, les résultats de cette conférence nationale du handicap (CNH) n’ont pas été à la hauteur des enjeux. L’attendu n’était pas seulement des moyens, même si un catalogue de mesures a été annoncé. Le président n’a clairement pas pris en compte le sens et l’esprit de l’avis du Comité européen des droits sociaux (CEDS) de ces derniers jours, ni celui de l’ONU, par son Comité des droits des personnes handicapées (CDPH) en août 2021, prônant une approche par les droits des personnes en situation de handicap, comme le soulignent la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH) et la Défenseure des droits dans leurs rapports et avis. Ce changement de paradigme attendu pour une grande politique de l’autonomie n’a pas été à l’ordre du jour.

Certes, il y a des points positifs.

  • La création d’un service de l’emploi universel est un pas important, à condition que la formation des conseillers, d’une part, et que l’accessibilité des lieux et des dispositifs, d’autre part, soient à la hauteur. Il en va de même pour les aménagements et accompagnements dans les entreprises.

  • Les mesures annoncées concernant l’enseignement supérieur vont dans le bon sens, surtout si les universités pilotes prennent en compte les propositions publiées par le Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) cette semaine à ce sujet.

La Ligue des droits de l’Homme (LDH) reste cependant sur une appréciation négative, car l’approche par les droits n’est pas privilégiée.

  • Sur l’accessibilité, la France accuse un tel retard, depuis les lois de 1975 et de 2005, que l’enveloppe d’1,5 milliard d’euros annoncée[1] reste largement insuffisante. Ensuite, mettre des moyens pour l’accessibilité sans abroger la loi Elan est un non-sens, même avec la « prime adapt » qui demande aux personnes en situation de handicap (PSH) de faire les démarches et travaux car la charge repose sur les personnes handicapées, tout le contraire de l’accessibilité universelle. Quid de l’obligation de l’accessibilité si elle n’est pas sanctionnée ? Elle n’est toujours pas un impératif majeur pour l’Etat et tous les espaces publics qui devraient faire la démonstration de la nécessité par l’exemple comme le font tant d’autres pays ?

  • L’approche médicale continue à être privilégiée, avec l’attribution de droits et prestations après reconnaissance sur la base d’un dossier médical. On reste sur l’approche paternaliste et médicale du handicap, ce que l’ONU et le Conseil de l’Europe reprochent à la France.

  • Donner des droits aux travailleurs en établissements et services d’aide par le travail (ESAT), ou encore créer 50 000 places supplémentaires en établissement spécialisé en évoquant la nécessité de la désinstitutionnalisation, en précisant que les associations (absentes pour la plupart) y étaient prêtes : une grande promesse, mais sur quelle base ? Le sujet est suffisamment complexe et vient remettre en cause le fondement même de l’existence des établissements. La désinstitutionalisation nécessite d’urgence une grande concertation avec tous les acteurs concernés, et, en premier lieu, les personnes concernées et pas seulement avec les associations représentatives gestionnaires d’institutions. Sur cette question, le manque de représentation des personnes elles-mêmes, largement souligné par l’ONU, n’est visiblement, ici encore, pas à l’ordre du jour.

  • Enfin, la réponse de la ministre à la clôture de la convention, « oui vous avez raison on n’a pas parlé des aidants, qu’il ne faut pas oublier » démontre pour le moins une grande légèreté dans la prise en compte de 8 et 11 millions de personnes !

Le CEDS et le CDPH des Nations unies exhortent la France à agir, avec une feuille de route des plus claires, pour une approche par les droits des personnes en situation de handicap. Ces dernières ont des droits, les mêmes que toutes citoyenne et tout citoyen. Les politiques les concernant doivent être conçues dans ce sens et avec elles.

[1] Soit 5,5 % d’augmentation sur une année, ce qui serait proche de 1,37 % sur le quinquennat, et n’a pas été précisé.

Paris, le 5 mai 2023