Qu’est-ce qu’un « superprofit » ? Constate-t-on une augmentation anormale des profits de plusieurs multinationales ? Et ces même « superprofiteurs » perçoivent-ils des aides publiques ? Une enquête de l’Observatoire des multinationales.

Les énormes bénéfices engrangés par TotalEnergies ont défrayé la chronique cet été. Dans un contexte marqué par la guerre en Ukraine, la crise climatique et l’inflation, alors que des milliers de ménages se demandent comment ils pourront boucler leurs fins de mois, le groupe pétrolier a annoncé un résultat semestriel ajusté de plus de 18 milliards d’euros (ramené à 10,4 milliards pour tenir compte de la dépréciation de ses actifs en Russie). D’autres grandes multinationales, notamment dans les secteurs de l’énergie, du transport et des matières premières, ont elles aussi accumulé des milliards de bénéfice sur les six premiers mois de 2022.


 

Tout ceci n’a pas manqué de relancer le débat sur les « superprofits ». En France, l’opposition de gauche et la société civile militent pour leur taxation. Une partie de la majorité présidentielle ne semble pas insensible à leurs arguments. L’Union européenne propose une « contribution exceptionnelle » des entreprises pétrolières et gazières au vu de leurs bénéfices historiques. Le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, a tenté de balayer le débat en déclarant « ne pas savoir » ce qu’est un superprofit, tandis que dans les milieux d’affaires, on fait valoir que les Français devraient être contents d’avoir des champions nationaux en bonne santé financière, dont on nous promet qu’ils utiliseront ces bénéfices pour nous préparer un avenir plus vert.

Qu’est-ce qu’un « superprofit » ? Constate-t-on effectivement une augmentation anormale des profits du CAC40 ? Cette augmentation concerne-t-elle également tous les groupes et tous les secteurs ? Comment s’explique-t-elle ? Et que vont faire les entreprises de cet afflux d’argent frais ? Dans le cadre de la préparation de la prochaine édition du « CAC40 : le véritable bilan annuel », nous nous sommes penchés sur les chiffres publiés par les grandes entreprises françaises pour le premier semestre 2022, afin d’apporter des éléments de réponse à ces questions.

73 milliards de profit malgré les pertes liées à la Russie

Premier constat : avec 72,8 milliards d’euros de bénéfice net cumulé [1], le CAC40 poursuit effectivement sur la lancée des niveaux record de profits engrangés en 2021. Et ce alors même que plusieurs groupes de l’indice (Renault, Safran, Société générale, Worldline...) ont enregistré des résultats négatifs de plusieurs milliards sur les six mois écoulés.